Je vous parle d'un lieu où l'Homme n'est plus.
Parce-qu'il a refusé délibérément de croire en la possibilité de sa disparition au moment où des choix pouvaient encore être possibles et s'offraient à lui.
Parce-qu'il a préféré continuer comme tous ses prédécesseurs à appliquer les idées et règles qu'on lui avaient apprises ou inculquées en pensant que la solution viendrai assurément des autres, plus tard, après lui pour ses enfants et il s'est contenté de cela pour se rassurer et continuer à faire à peu de choses près ce qu'il avait toujours fait...c'est à dire globalement et raisonnablement : Rien.
Juste continuer. Oui, mais voilà : la "Solution" n'est jamais venue. Et nous en sommes là. Ou devrais-je plutôt dire que nous n'en sommes plus là. Définitivement.
Avant pourtant, ils y avaient eu des signes... On s'interrogeait bien sur quelques problèmes désormais visibles dans l'ordre naturel séculaire établi. Mais les spécialistes, bien qu'en constatant les faits, avaient conclu qu'à cela rien d'alarmant. On ne s'inquiète pas face au doute scientifique car on ne peut craindre ce qui n'a pas de contours précis. On se donne le temps de l'analyse approfondie du phénomène, on dédramatise.
Quand le problème nous échappe, nous préférons assurément qu'il ne soit pas identifié ou révélé. La crainte se contente du flou quand des traits précis laissent place à la peur. Celle-ci génère des interrogations ou pire peut aboutir à des remises en cause de modèles établis. Le Pouvoir déteste qu'on discute les fondations sur lesquels il s'est confortablement installé pour exercer de droit son mandat. On rassura donc la masse grouillante qui continua à faire ce qu'elle avait toujours fait, récitant inlassablement la même partition, à la virgule près, en étant convaincu qu'en sortirait infiniment les sons de matins qui chantent mieux que les précédents. Mais la musique changea à mesure que les instruments se désaccordaient. Des dissonances bientôt se firent entendre. L'agencement de l'ordre naturel du monde vascillait et nous allions en subir les incalculables conséquences. L'ère de la Dévastation Inversée s'ouvrit: l'exploitation totale et irraisonnée des ressources naturelles se retournèrent contre l'exploiteur, responsable de réactions en chaînes catastrophiques et, à l'échelle des possibilités humaines, incontrôlables.
Le chasseur transforma l'ordre naturel de son environnement tel qu'il le fit devenir définitivement proie...